INTERVIEW d'AKENATON publié en juillet 2000 par le Journal de la Corse
Tout d'abord pouvez vous en quelques mots présenter
AKENATON et
On peut toujours essayer! AKENATON c'est une entité à 2 têtes et parfois plus, Jean Torregrosa, Philippe Castellin. Et évidemment AKENATON ça n'est ni l'un ni l'autre ni une addition, mais un véritable tiers, auteur de travaux multi (ou inter) media, difficiles à classer parmi les catégories existantes. Des actions tantôt, des performances, des travaux d'ordre plastique, des installations, ou bien des livres ou des CD rom, toutes ces choses ayant été présentées à de nombreuses reprises et un peu partout depuis une quinzaine d'années. En Corse, pour ne rappeler qu'un souvenir (ici il s'impose...) nous avons eu le plaisir en 1988 de réaliser une grosse installation intitulée Semina Rerum dans les anciens locaux de l'imprimerie Siciliano... L'idée était de relier l'ancien monde, celui de l'imprimerie traditionnelle et de ses plombs, avec le nouveau, incarné par l'informatique. Nous avions même rêvé un moment de ne présenter qu'un ordinateur allumé, seul au milieu des ateliers désaffectés, enduits d'encre...
Le dernier numero, qui vient de sortir, est un gros
volume de 400 pages très denses avec un CD rom; il s'intitule
WEB
Dès le milieu des années 80 nous nous
sommes intéressés
à l'informatique et aux nouveaux medias. En 96 nous avons
publié un numero de
En 98 les choses étaient suffisamment avancées
pour que nous puissions jouer le rôle de commissaires pour la
section "arts électroniques" dans le cadre d'une grosse
exposition qui a eu lieu tout au long de l'été, à
Aix-en-Provence. Nous y avons rassemblé plus d'une centaine de
poètes "électroniques" du monde entier, présenté
leurs travaux sur notre site ainsi que dans le cadre de la manifestation,
Pavillon Vendôme. Par la suite nous avons remanié et enrichi
le résultat de ce premier travail et voilà, WEB_
Pour vous le CD ROM va- t -il remplacer le livre?
Non; prenons un exemple plus simple: la video. La video
n'a pas remplacé le cinema. Mais son existence a eu de multiples
effets sur ce dernier. Pour WEB -
C'est vous qui réalisez tout cela techniquement?
Oui, bien sûr. De même que pour parvenir
à publier
Au terme de ce voyage au sein du web que retenez
-vous d'essentiel par rapport à la poésie?
Des rencontres d'abord, des artistes que nous ne connaissions
pas et avec lesquels nous sommes désormais en relations, Reiner
Strasser, Jim Andrews , Annie Abrahams .... Ce sont des gens qui ont
développé une vraie démarche poétique sur
le web. En ce qui concerne Strasser par exemple il a mis en ligne des
travaux liés à la guerre du Kosovo, un poème pour
chaque jour de guerre: l'ensemble figure dans Web
Autre chose, c'est le constat que les choses évoluent à une vitesse fantastique, parfois effrayante . Quand nous avons commencé, en 97, il n'y avait, outre nous-mêmes, dans la zone française, qu'un seul site ayant trait aux poésies expérimentales , celui d'AIOU et Jean Monod. Deux ans plus tard il y en a des dizaines, des centaines. Presque tous les poètes que DOC(K)S a publiés depuis 76 sont passés au web, tous ceux de la poésie animée par ordinateur sont en train de le faire et ceux de la performance aussi. Et même, aujourd'hui ceux de la poésie "écrite", "classique", ce qui peut faire sourire...
Pourquoi "sourire"?
Parce qu'il s' agit de gens qui le plus souvent ont commencé (c'était hier...) par diaboliser ou mépriser le web... Et aussi parce que le web a ses particularité, chose que ceux-ci paraissent ignorer. Un texte poétique n'est pas fait pour être "mis en ligne", ça n'est pas aussi simple, le web n'est pas son élément, c'est la page son élément. Si l'on veut travailler créativement avec le web il faut faire autre chose que du texte ou du "livre" en ligne, il faut intégrer la dimension du réseau, du multimedia, de l'image, du son etc. C'est là que ça devient passionnant, difficile et inévitablement voisin de toutes les recherches que l'expérimentation poétique a menées depuis des années, avec la poésie visuelle, concrète, sonore, avec les pratiques liées au texte-image ou à la video : toutes ces choses dont brutalement l'on constate qu'elles étaient bien loin d'être des "bizarreries" ou des "folies", tandis que et soudain, avec le web, elles gagnent une actualité flagrante.
Quels sont vos projets?
Pour
Et la Corse?
La Corse, fût-ce indirectement, se trouve toujours à l'arrière-plan de ce que nous faisons . Quant au web et aux nouvelles technologies, il s'agit, selon nous, d'un un espace où la Corse a tout à gagner. Le réseau c'est la conciliation possible de l'identité et de la relation et grâce à lui nous avons pu réaliser ici un objet qui rend jaloux tout le monde, y compris et surtout les américains. Et nous avons bien l'intention de matérialiser tout cela en réalisant en Corse même un dispositif qui incarnerait cette idée. Nous y travaillons. Pour l'instant ce sont les tours gênoises qui nous font rêver. Et la polyphonie. Mais d'autres idées peuvent surgir... |