Il ne suffit pas de ne pas comprendre quelque chose pour que celle-ci ait du sens, mais ce qui est trèclair est aussi trèsuspect : presque tout ce qui n'a rien àdire est parfaitement rédigé
Macedonio Fernandez .
Le Roman de la Rose.
Notre époque, notre sociétéa le vague au sens. Terme qui déassez bien la globalitédu phénomène, ce que d'autres ont pu analyséen fin de ci ou fin de ça.
Et plus qu'une simple perte de sens, semble-t-il nous le sentons durable ; en tout cas, il tourne autour des ouvertures faites par des techniques aussi bien dans l'informatique que dans la biologie et qui mébien le nom pourtant galvaudéde virtuelles. Le virtuel n'est pas nouveau, c'éle domaine du langage naturel qui savait étous les possibles. Ce qui est nouveau, c'est qu'il ne se cantonne plus au conceptuel, il touche maintenant au langage des images, sons... (donc ànotre perception) et au génome, langage exprimant du virtuel par dé(donc ànotre identité).
Et si dans l'histoire, nous cherchons une situation comparable, nous trouvons le XIIIe sièet c'est grâàune mystéoeuvre poéLe Roman de la Rose que nous pénédans le vague d'alors...
Roman apparemment d'initiation amoureuse, de conquêamoureuse, mais dont le thèprincipal est la dualitéillusion réalité, il est en fait tout autant un roman de la conquêdu réel. Ceci déjàdans sa structure : narration d'un rêqui déle déest annoncécomme s'êréalisé, mais ce sera le rêqui sera narré. Aussi dans la scècharniède la fontaine (porteuse du thèavec le reflet, mais aussi des symboles qui font sens, pour Guillaume de Lorris : fontaine d'amour ), celle de la déde la rose, celle entre la contemplation du jardin et le passage àl'action de la conquête. Elle sera reprise par le second auteur Jean de Meun, continuateur de l'úuvre laisséinachevée, et qui en fera le lieu de la critique des idéde l'auteur originel (modifiant les symboles : fontaine de vie).
C'est que les idéd'Aristote font leur chemin grâaux penseurs arabes et sont porteuses des éléde ce qui deviendra la penséscientifique (et qui s'opposent ici avec une pensémythique), de la logique avec entre autre le tiers exclu (s'opposant ici au symbole de la trinitédu monde chrétien). Mais rien n'est clair : par exemple, c'est le "rationnel" Jean qui déle concept de trinitéface àcette dualitédont s'accommode trèbien le "symbolique" Guillaume. Et enfin dans son destin d'úuvre, et ceci désa naissance avec ce second auteur qui critique la dédu premier au nom du rationalisme naissant, mais qui pourtant annonce sa venue àl'intédu rêpour l'achède l'úuvre, faisant qu'au moins sur ce point le rêse réet donc confirme l'axiome de Guillaume.
C'est que tout est devenu bien vague avec ce nouveau monde ouvert (nous sommes encore loin de la péappeléRenaissance), et ce roman (texte éen langue romane, mais ici est de mênature que le roman moderne et je pense àKafka, Musil...), bien plus que les traces édes querelles théologico-philosophiques qui ont lieu àcette époque, nous décet état, ce terrain vague (comme si le monde ancien avait connu une expansion pour remplir ce nouvel espace, et ceci sans apport de matière...) et qui prébien des aspects avec le notre.
Et pour illustrer ceci, je prendrai la question du Je, si essentielle déqu'on aborde le problèdu sens. Dans le Roman de la Rose, nous assistons àsa dilution par multiplication (narrateur-rêveur-rêvéet deux auteurs). A notre époque, nous avons plutôassistéàsa division dans l'intertextualitéet toutes les notions qui ont suivies, àson non-lieu dans la dédu signe (comme l'âdans la dissection du corps).
Dans le flot de tous les jours, ceci se traduit par le zapping, fuite devant l'auteur, ses intentions, le sens. Car indiscutablement, notre fontaine est la télévision, fontaine de sens. Mais il est un autre écran, celui de l'ordinateur individuel, qui permet une inter-activité, peut êde transformer cette fuite en action, en inter-action...
S'il est vrai que le problèdu sens n'a pas de sens, je prie tous les acteurs de quitter la scè. La scèdu Je.
Basarab Nicolescu
L'édu Je.
Il ne s'agit pas d'envisager une Renaissance (remettant en ordre, en sens) ; on peut en outre douter de sa venue. L'Aristote d'aujourd'hui est celui de la logique floue, le rationnel est du côtédu chaos et vague aprèvague attaque les digues du déterminé. Et la nouvelle imprimerie, le nouveau grand diffuseur d'idéest déjàlàet ce réglobal procèlui-mêdu vague.
Simplement des reconstructions, jamais achevées, toujours àfaire, car il ne s'agit pas de nier cet intertexte ; mais il s'agit de le dévoiler, de le susciter mêen faisant éle lecteur, un lecteur évolué(comme Brecht parlait de spectateur évolué), de l'analyser et proposer une suite qui déde cet intertexte, devenant ainsi hypertexte ; on pourra parler ainsi de trans-textualité. Ceci peut êréalisépar l'éd'un programme informatique associé, conçavec et pour, le texte en langage naturel. En fait, et paradoxalement, se servir de la machine, une machine logique, d'algorithmes programmé(en fonction d'une logique propre àl'úuvre et des lois de la séet de la sémiologique), pour réle je. Pas si paradoxal que ça, puisque déde je, elle n'altépas le je initial. Par nécessité, le support est alors numérique, ce qui offre en plus la possibilitéd'un environnement multiméàla lecture, ce qui n'est pas néàune édominépar l'audio-visuel et qui rappelle les enluminures des manuscrits... Il suffit d'un systèd'impression, pour que cette trans-textualité, regroupement des petits textes édurant une lecture, retrouve un support papier et un statut de texte littéraire. Autant de textes autant que de lecteurs, que de lectures, non textes de création, mais textes de lecture qui pourraient êrelus juxtaposégrâàleur télésur un site internet... créun phénomède récursivitéproducteur de sens pour de nouvelles lectures...
Nous voyons qu'il ne s'agit pas d'un généde textes, de textes simulés.
Lire-voir les réentre autres de Jean-Pierre Balpe et ses articles parus par exemple dans le numécommun Doc(k)s-Alire 1997 (avec cédérom) (1). Le généfait naîla notion de "méta-auteur"(du programme), de lecteur-auteur (des paramèdu programme). A ce dernier, on pourrait par analogie donner le nom de ré(il réun texte parmi les virtuels) et dans ce cas au premier celui de scénariste. On sait que c'est le cinéqui a reposéen ce sièla question de l'auteur et qui sembla avoir tranchépour le réen disant àpeu prèceci : le scéest une contrainte comme une autre dans l'exercice de l'art cinéqu'est celui du réalisateur-auteur. Il s'en accommode, faisant du scéun technicien, ou en déqu'il ferait bien de l'élui-même, au pire de participer àson écriture. Je pense que nous sommes làdans une relation de mêtype, entre cré; et de même, notre révoudra participer àla programmation. La production d'un "suppléde sens" qu'apporterait la lecture d'une répar rapport àcelles déjàréaliséou encore virtuelles néla préd'un spectateur. Il y a alors un apport certain de sens ; car pour moi, il n'y avait pas sens avant. Wittgenstein le disait déjà: "les propositions logiques ne disent rien", et c'édes propositions logiques simulant le langage naturel. Car pour continuer la mécinématographique, il manque dans ce sché: l'acteur. Les arts plastiques ont aussi remis en question la notion d'auteur, avec les performances et happenings, méúuvre et vie, auteur et acteur. C'est plutôcette voie qui est suivie ici, combinant úuvre et lectures, auteur et inter-acteur...
Dans notre cas, c'est une é(en reprenant un terme informatique) de je, en rédans une úuvre poéses lectures possibles. S'il y a simulation, elle est comme le rêdans le Roman de la Rose, plaçun éauteur (2) d'une telle úuvre dans le rôd'un troisièauteur du Roman de la Rose... Et d'une introduction àune possible littéde l'é: transformer le vague en la vague sur laquelle un lecteur peut faire l'expéd'une nouvelle lecture poétique.
Gilles BOUSSOIS - E-Mail : ed.sous.bois@wanadoo.fr
(1) : ALIRE - 27 allédes coquelicots 59650 VILLENEUVE D'ASCQ DOC(K)S - 12 cours Grandval 20 000 AJACCIO E-mail : akenaton_docks@sitec.f Site : http://www.sitec.fr/users/AketanonDocks
(2) : L'auteur de ces lignes entreprend une mise sur cédéd'un tel texte, comprenant une initiation àce type de lecture avec le texte du Roman de la Rose.
(0) : PhrÈatique - 40 rue de Bretagne 75003 PARIS E-mail : phreatiq@multimania.com Site : http://www.multimania.com/phreatiq