Déclin, précipité,
tombé, la chute vers le bas, tomber, tombe, précipice
au bord, précipité, en bas, tombé, perdre
pied, oublier le bord, effondrement,
au bout, chute,
Là, des corps vont s'échouer, là, sur une
bande de terre noire, entre rocailles et caillasses. On dit d'eux qu'ils
viennent de là-bas, en pointant du doigt l'horizon. Mais personne
ne sait, personne ne souhaite savoir. D'ailleurs qu'importe, là-bas
c'est suffisant, l'horizon indéfini.
Je tombe, d'autres aussi, beaucoup d'autres, Tomber là, large étendue large de terre noire, il fait froid, corps en bas transis, dans la chute, déclin, des corps en bas, des corps transis, meurtris, laisser têtes percuter la
caillasse, têtes écrasées, tuméfiées
en bas, éclatées, pas tous, d'autres sûrement d'autres, sont tombés, hurlent doucement, impossible, on entend rien, le souffle est le vent qui passe et chasse,
les râles, l'agonie par-delà là-bas, ici, le froid au moment clos dedans la douleur, choir, laisser là, d'autres ont pris le temps, temps de la chute, lourds se brisent, les morceaux sont d'os, la viande et le tout se mêlent,
le tas se fait, s'entassent et là des corps viennent gonfler
le surplus, certains y échappent de justesse, peut-être par
méfiance, certains se méfient, cherchent l'endroit de
leur chute, cherchent l'amortis, le lieu dit, le lieu dit d'une chute possible sans rien d'autre, certains ne cherchent rien d'autre qu'un lieu de chute propice, les autres n'ont rien dit, rien dit sur le lieu de leur chute,
ils se sont laissé tomber sans chercher, juste là, précipités
du bord même,
Au bord c’est-à-dire avant, bien avant, à
la limite entre, Au bord comme au bout, extrême où limite là,
l'arête promontoire, stop, marque le temps de l'arrêt, l'hésitation
du dernier temps, attente, Attendre au bord presque au bout, au bout, le loin d'après
dans le dessous, le bas l'attente en attente chute à venir du moins pour l'instant
-moment latent-- est-ce maintenant à la limite où l'attente
dure le temps encore, respire, Celui-là, celui qui d'entre tous est le même par
le même en présence de lui,est au bout sur le bord et près
de lui, attente, Viennent-ils d'une part d'ici, ou d'autre part aussi, mais
à ce moment précis entre, on peut attendre juste, Lui vient peut-être d'ici qu'importe au bout, il reste, là, : attendre le moment propice, lui, : au bord presque maintenant, se tient debout près, lui d'ici, peut dire sa présence, en lui-même
et surtout, Monologue puisqu'ici bord je me presque en suspend, que les
pas là, derniers, le sol en surface se dérobe, pose, je
pose, et baisse, dépose et reste, le détour pour arriver -longtemps cheminer- l'errance
et vide tout en entier, c'est être transparent du moins d'être,
passer au travers, traverser par où passe et repasse sans cesse
jusqu'au bout, : c'est ici, un bord, en rase terre, un sol uni, limite enfin, D'où je suis presque pas, un pas, franchir, laisser le tomber,
tombé,
Au bas, à la limite, entre terre noire caillasses et
rocailles, défaits, restes et morceaux,
une fuite, une histoire, un parcours, s'en sortir et certains pas, sur une lande, à perte de vue, charognards, engins creusant la terre, des trous, les fosses, machines charriant des débris, concassant les restes, comblant les fosses, recouvrant d'une épaisse couche ce qui doit être
oublié, au fond, au plus profond d'un quelque part pour ne plus, savoir, ne rien savoir, ne plus rien savoir, ne pas vouloir voir d'avantage, plus d'histoire, oubli, par dessus tout, recouvrir, effacement des traces, la douleur ailleurs, en haut qu'elle y reste,
au lieu dit de l'attente, des corps vont se perdre, là,
Certains peuvent au bout d'un temps, se relever, prendre une position
verticale, chanceler quelque peut, ou bien rester assis. Le froid souvent
la pluie ou plutôt les machines, les obligent à chercher
refuge, dans un maquis d'arbustes épineux, un dédale de
chemins que d'autres avant eux ont taillé.
Je me relève, d'autres ont déjà quitté le lieu dit de
leur chute, d'autres ont fui l'arrivée des engins, évitant
de peu l'enfouissement, d'autres ont rejoint l'orée des sentes, au bord du maquis, d'autres laissés en suspend n'arriveront pas, pas jusqu'ici,
par fatigue, par lassitude, par peur, parce que la chute peut-être
fatale, d'où l'importance du choix de la chute, nul ne peut chuter
sans vraiment savoir où. Certains non pas sus, non pas cherchés à savoir,
non pas souhaité se relever, épuisés, ou bien croyaient-ils
en avoir fini, ici, au lieu dit de la chute, sur une bande de terre noire, croyaient-ils la terre suffisamment noire pour disparaître
en elle, suffisamment noire pour qu'on les oublie là, suffisamment noire pour ne pas avoir à la fuir, avaient-ils
confiance en elle ? Se croyaient-ils à l’abri, eux pour qui la chute
était déjà le dernier souffle, Quand les machines ont ouvert les tranchées, remué
la terre, fait apparaître les os blancs au-dessus, eux ont été poussés par les pelles, eux ont disparu à leur tour, dessous, sous une bande de terre noire, entre rocailles et caillasses, |