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MARIO BORILLO
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Date: Mon, 22 Dec 1997 10:52:05 +0100 (MET) From: Mario BORILLO <borillo@irit.fr>
To: akenaton_docks@sitec.fr
Subject: merci... et plus loin

Chers Philippe Castellin et Jean Torregrosa, Le numero "Informatique" de DOC(K)S + ALIRE (avec son CD-ROM) donne une idee precise du chemin parcouru... dans la diffusion des pratiques, leur maitrise. Des oeuvres nouvelles apparaissent, les votres, d'autres aussi, des "textes" cinematiques comme on n'en a jamais vu (ni entendu, pas encore touche: a quand la poesie tactile?)
Un appareil analytique pertinent s'esquisse, mais les inevitables supplements d'ame heideggeriens ne sauraient manquer. Le vrai chic parisien, que diable! Pour moi, le plus radical n'est pas la, tout ceci etait previsible depuis longtemps (cf. ma contribution au catalogue des "Immateriaux") et le plus spectaculaire est a venir. Mais est-ce bien dans la sensorialite, le multimedia, que reside l'enjeu? Que devoile-t-il que nous ne sachions deja? L'extension infinie de la techno?
Mais si l'informatique n'est rien d'autre qu'un schema abstrait de ce que l'on appelle l'esprit et le cadre theorique des sciences de la cognition, et puisque la poesie du XXIeme siecle, depouillee elle-meme de son pittoresque et de ses attributs contingents -elle les aura tous epuises- apparait de plus en plus dans sa dimension essentiellement mentale, la rencontre de l'une avec l'autre n'est pas tellement destinee a engendrer des "poemes-spectacle" qu'a eclairer la nature de la poesie. De mille et une manieres et en particulier par la voie de "l'experience poetique", au sens de "experimentation en poesie", comme il y a une experimentation en psychologie (eg. pour decrire les processus de la memoire) ou en linguistique (eg. pour decrire la formation du sens). Mais ici en beaucoup plus difficile, puisque la poesie en est encore a tenter de reconnaitre intersubjectivement son objet. Comme je l'ai suggere dans "Poetique (x)", il n'y a la rien que d'autres projets de connaissance n'aient rencontre en leur temps. Ne nous faites pas le coup de l'exception, de l'ineffable, pire, de la transcendance... La poesie a venir sera tout a la fois contribution a l'etablissement raisonne de ce qui est poetique et travail delibere sur le temps, sur les limites, sur l'emergence peut-etre irrepressible du poetique. C'est la que la vieille utopie de la rencontre entre creation et savoir, commencera non pas necessairement a s'accomplir mais plus modestement a se definir. Quelque chose de nouveau s'ouvre vraiment et il faut avoir l'audace de le nommer. Comprendre par/avec des machines quelles machines nous sommes.
A vous, avec mes remerciements et tres amicalement.

Mario Borillo

PS. Vous pouvez evidemment publier cette lettre