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CLAUDE MAILLARD 

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Serait-ce le mythe ? Est-elle le mythe ?

L'informatique s'avère mythique. Elle est cette insituable. Cette incodifiable où je m'implique.
Je ne technologise pas ce que j'écris. J'écris dans le chemin de ma démarche. Et ma démarche passe par les machines. Je n'ai pas de crainte par rapport à la technologie. Car l'écriture va bien au-delà des machines. J'informate (de mathe mathème) en écrivant. Si je n'écrivais pas, je ne ferais pas d'informatique. L'informatique est faite ni pour technologiser l'écriture. Ni pour la commenter. Mais pour la faire entendre dans son acte. Dans son chiffre.

Dans la transposition qui l'induit, elle module mon écriture. L'entraîne dans une émergence inhabituelle. En une langue où la logique est celle du temps. Et où me nommer se fait à chaque tour et détour de la lettre. Car il est impossible de ne pas entendre que c'est le sujet, c'est à dire moi en tant que sujet (en temps de sujet) qui informe la machine. Machine qui n'est ni une prothèse ni un partenaire. Mais une adjacence, permettant qu'il y ait l'Autre. De l'autre. Et l'écriture se re-joue dans le lieu de parole. Jusqu'à s'y réjouir. Re-jouissance. Rejouant d'un in-sens inductant la différence. Dans sa traversée informatique ou plutôt informante, I'écriture est plus que jamais informelle.

L'informatique irrupte dans le champ de mon écriture. Comme une fiction, qui parcourt de plein droit, le jeu interminable de la lettre. Opérant dans l'articulation que l'acoustique fait entendre sur ce qui advient de mot en mot. Dans la distance que le sonore donne à la lettre danse l'informatique. Et court le jeu de la lettre dans la prosodie de la machine. Le long de l'art ordinateur, hors des circuits ségrégants des programmes.

Cette informatique là ne s'apprend pas. C'est mon itinéraire d'écriture qui l'inscrit. Et qui l'entraîne dans mon histoire. M'informe de mon écriture, la machina. M'ach(em)ine l'écriture. Dans une inéconomie de temps inconcevable jusque là. Toute autre chose que le temps des aiguilles, cette informatique d'écriture.

Et s'extrapole le sens dans le déroulement de la lettre. Aventure informatique de la langue. A chercher à livrer l'irreprésentable de la lettre accentue le côté inextinguible de l'écriture. Sa dé-mesure. Son extravagante vitalité de mort. Que l'informatique dont je parle soit pulsionnelle va de soi. Que sa violence bouscule la forme ou la transforme n'est pas pour surprendre. Car à chaque intervalle pointe ce qu'il y a dans la lettre d'inconvocable.
Et se déroule dans l'informatique le temps de la parole. S'y dévide.

Aucune ligne de démarquage entre l'informatique et l'écriture. Aucun partage. L'informatique est engagée, ici, dans l'acte. Dans un agissement pulsionnel. Sa pratique appartient à la lettre. S'y combine.

Informatique, le temps d'écriture. Faisant entendre l'électronique de la langue dans le défilé acoustique des images. Faisant ouïr l'infinitude d'écrire. Et pointant son acte en tant qu'art.
Le mythe de l'informatique est celui du temps. Au-delà de l'alphabétique et du mémorial thanatologique. Dans l'absolu de l'expérience.

 

Ce texte a été publié dans DOC(K)S/Alire, 1997